J’ai croqué Vianne toute crue depuis l’autre rive. Est-ce la péniche fleurie dormant sur l’eau tranquille qui m’a fait préférer rester à l’extérieur ? Est-ce le grand air, la nature, le roulement de l’écluse qui m’ont fait m’éloigner d’un centre-ville pourtant agréable ? Est-ce que j’ai simplement été arrêté par l’étroit pont de bois qui fait peur à mes rétroviseurs ?
“De la bastide, je ne capturai finalement que le vieux moulin pléonastique”
En vérité, je crois que j’aime particulièrement quand l’humaine architecture embrasse la forêt et se reflète dans la rivière. Du ponton où je dessinais, des arbres que je ne saurais prénommer volaient la vedette aux édifices médiévaux qui font de Vianne la réputation. Ils leur faisaient de l’ombre, pour ainsi dire.
Buissons, fourrés, arbustes et autres arbrisseaux pullulaient sur les berges dans un camaïeu de verts, les racines plongées dans la Baïse et même les branches, parfois. De la bastide carrée joliment conservée aux remparts percés par quatre portes massives, je ne capturai finalement que le vieux moulin pléonastique.

Je repas avec cette découverte : Vianne est double. D’un côté, la solide forteresse savamment dessinée, ses tours, ses murailles ; de l’autre le port, discret, sauvage et ouvert sur le monde…
“Vianne est double, et pourtant non-duelle”
Et en même temps, ce sont évidemment les deux faces d’une même pièce, toutes deux participant de la quiétude et de la majesté de la ville. La vaste place qui en occupe le centre a tout de la rivière paisible. Certaines demeures du bourg aux devantures d’époque cachent en leur arrière-cour de véritables bicoques de pêcheur.
Vianne est double, et pourtant non-duelle. On y arrive le plus souvent par bateau, autre rapport au temps, autre rapport aux mœurs. Et d’ailleurs la bastide semble voguer subrepticement sur la Baïse, telle une immense péniche. Ralentissement, engourdissement, silence.
